M. Caouic n'aime pas Les Amants du Pont Neuf.
Merde alors.
Mais vraiment pas du tout.
Certes, nous n'avons pas regardé ce film avec l'attention exclusive qu'il réclame. Mais tout de même. Ça lui a fichu le cafard. Il a trouvé ça vide.
Moi, je ne me souvenais plus quand ni dans quelles conditions je l'avais visionné pour la première fois. Je ne me rappelais plus de l'histoire, la chronologie, l'intrigue, la fin... Il me restait un souvenir imprécis d'amour, d'extravagance, de marginalité, de jeu d'acteurs et de folie, surtout. Pendant tout le film, on est sur une limite. Très ténue. Je crois que ce film ne ressemble à aucun autre que j'ai vu.
C'est un film sur l'amour, sur la Ville, sur la rue. Sur le feu. Le cracheur de feu, les feux d'artifice, la voiture en feu, l'homme immolé, les flammes devant les yeux de Michèle qui perd la vue... Elle perd la vue à mesure qu'il gagne l'amour. Un sens la quitte, il s'approprie un sentiment. Ses yeux à elle perdent leur humanité, les siens à lui s'emplissent d'adoration. Ses yeux fous à lui. Butés, animaux. Son front comme un mur à la réalité, la triste réalité qui l'entoure : la rue, les cloches, le mauvais vin, la drogue pour dormir. Ah oui, il ne peut plus dormir, fermer les yeux, quoi... Alors ils inventent leur propre réalité. C'est précisément amoral et insensé, la réalité inventée d'un garçon et d'une fille qui vivent dans la rue, sur un pont en travaux dans la plus belle ville du monde qui célèbre le bicentenaire de sa Révolution.
Je comprends d'autant moins qu'on soit hermétique à ce film dans sa totalité qu'il présente quelques scènes moins hermétiques, moins oniriques, plus ordinaires : le stratagème pour dépouiller les messieurs aux terrasses des cafés, l'escapade à la mer, leur épisode dans la vraie vie pendant qu'Alex est en prison. Juste après, pendant les retrouvailles sur le Pont, Michèle raconte même une histoire drôle bien grasse, bien triviale. Et puis ça finit bien, aussi... Alors que c'est bien la seule fin à laquelle moi, en tous cas, je ne m'attendais pas.
Enfin, il n'y a rien à comprendre, comme souvent. Léos Carax, sa dureté, sa folie, sa beauté, m'a prise par la main et est parvenu à me garder d'un bout à l'autre de son film. Il n'a pas emmené tout le monde, loin s'en faut, et je sais que ce n'est pas un film « facile ».
Je ne sais plus si j'ai vu beaucoup d'autres films de Léos Carax. Mais celui-ci est évidemment son chef-d'oeuvre, sa folie de jeunesse, son secret avoué.
Mais maintenant, un voile le recouvre : il rend M. Caouic triste...
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